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12 fevereiro 2009

Laure Limongi à queima-roupa




1) O que é poesia para você?

Avant tout, une vaste question!
Pour moi, la poésie est question (des formes, des émotions) mais surtout pas réponse.

Comme l’écrit l’écrivain français Francis Ponge dans Comment une figue de paroles et pourquoi (1977): «Je ne sais pas du tout ce que c’est la poésie, mais assez bien ce que c’est qu’une figue.»

Je pourrais très bien décrire ce qu’on m’a désigné comme «poésie» tout au long de mon parcours scolaire et en tirer une définition. Mais pour moi, la poésie n’est pas circonscrite, justement, par des éléments formels. Dans mon propre travail, par exemple, ce qui m’intéresse, c’est de confronter la poésie à d’autres genres, le roman, en particulier. De sorte que je suis bien en peine de définir la nature de mes écrits…


2) O que um iniciante no fazer poético deve perseguir e de que maneira?

Je n’aime pas les postures prescriptrices, à vrai dire… J’imagine que quelqu’un qui décide de se consacrer à la poésie sait ou sent ce qu’il doit poursuivre.
Selon moi, la sincérité de sa posture est essentielle: la nécessité du faire. L’évidence de la forme. Être entièrement dans le processus que l’on crée. Ne pas se laisser influencer par la mode, les désirs des éditeurs, le sens du vent… Mais tracer sa route en sentant que c’est bien sa propre route que l’on trace.

Évidemment, les lectures sont importantes, toutes les influences sont importantes, littéraires, musicales, plastiques, quelles qu’elles soient… Mais il faut rapidement franchir la frontière qui sépare le lecteur/écrivant (figé par la fascination, ressassant plus ou moins ses lectures) de l’écrivain.

3) Cite-nos 3 poetas e 3 textos referenciais para seu trabalho poético. Por que destas escolhas?

1- Un poème de Jodelle (1532-1573), tiré du recueil Les Amours:

«Comme un qui s'est perdu dans la forest profonde
Loing de chemin, d'orée et d'adresse, et de gens:
Comme un qui en la mer grosse d'horribles vens,
Se voit presque engloutir des grans vagues de l'onde:

Comme un qui erre aux champs, lors que la nuict au monde
Ravit toute clarté, j'avois perdu long temps
Voye, route, et lumiere, et presque avec le sens,
Perdu long temps l'object, où plus mon heur se fonde.

Mais quand on voit, ayans ces maux fini leur tour,
Aux bois, en mer, aux champs, le bout, le port, le jour,
Ce bien present plus grand que son mal on vient croire.

Moy donc qui ay tout tel en vostre absence esté,
J'oublie, en revoyant vostre heureuse clarté,
Forest, tourmente, et nuict, longue, orageuse, et noire.»

Ce poème exerce une étrange fascination sur moi, depuis longtemps, sans que je puisse vraiment l’expliquer. Peut-être son atmosphère, l’utilisation de la répétition et des assonances, le fait que, s’inscrivant dans une forme stricte, réglementée (le sonnet), il l’excède et la transcende.
Parenthèse: le poète français Christophe Tarkos semblait également aimer ce sonnet puisqu’il le cite dans son livre Processe: http://www.pol-editeur.fr/catalogue/fichelivre.asp?Clef=6231

2- Le travail poétique de Francis Ponge (1899-1988). J’aurais bien du mal à choisir un seul de ses poèmes… Pour moi, il y a un avant et un après Le Parti pris des choses (1942). Cette œuvre s’attache à décrire des objets, dans un travail vertical de la langue qui en faire ressortir l’histoire, l’étymologie. «Parti pris des choses = compte tenu des mots.»

Et puis la notion d’«objeu», aussi (contraction d' «objet» et «jeu») – illustrée dans La Rage de l'expression (1952). La parole est comme une «obsession», les répétitions et les variantes se lisent comme la preuve du mouvement perpétuel tendant à l'infini de l'écriture, montrant ainsi que la création a pour corollaire indispensable l’absence d’achèvement – «Ne cherchez pas mes brouillons, ils sont tous imprimés.» Mais le corollaire de l’«objeu» et l’ «objoie» (contraction d' «objet» et «joie»), c’est-à-dire, la jouissance de l’écriture.


3- L’œuvre de Denis Roche (né en 1937), à la fois poétique, «romanesque» (si l’on peut dire, la question du genre est délicate chez Denis Roche) et même son travail photographique. Tous ces éléments participent d’une esthétique fondamentale, hors genre, justement. Parmi les œuvres de Denis Roche, Louve basse (1976), m’a particulièrement marquée. Concrétion emportée d’éléments hétérogènes qui se coltine la mort à bras le corps, dans une frénésie physique, sexuelle, crue, une Vanité des temps modernes terriblement audacieuse.



Laure Limongi est née en 1976 à Bastia et vit à Paris. Elle a publié cinq livres: Éros Peccadille (Al Dante, 2002), Je ne sais rien d’un homme quand je sais qu’il s’appelle Jacques (AL Dante, 2004), La Rumeur des espaces négatifs (avec Thomas Lélu, Éditions Léo Scheer, 2005), Fonction Elvis (Éditions Léo Scheer, 2006), Le Travail de rivière (Dissonances, 2009). Elle publie également en revues et collectifs ainsi qu’en tant que critique, notamment sur le site Cronòpios. Elle dirige la collection Laureli aux Éditions Léo Scheer (www.leoscheer.com)
Blog de création: www.rougelarsenrose.blogspot.com
Email: laurelimongi@gmail.com